Le titre du livre, Histoires de la nuit, est aussi celui de l'ouvrage où Marion puise ]es histoires qu'elle lit à Ida avant que la fillette s'endorme - « Celles-ci sont parfois un peu effrayantes, c'est vrai, toutes ne sont pas à destination d'une fillette de son âge». Ce jour-là, Marion, qui travaille dans une imprimerie, s'apprête à affronter sa direction qui lui reproche à tort une faute. Il ne reste presque plus rien à La Bassée : un bourg et quelques hameaux, dont celui qu’occupent Bergogne, sa femme Marion et leur fille Ida, ainsi qu’une voisine, Christine, une artiste installée ici depuis des années. Collection : Roman Francais Minuit. Minuit Roman Francais Minuit 3 Septembre 2020 Littérature générale; Voir les détails produits . Qui fait la lecture à Ida. C’est à partir de cette configuration assez primitive que ce fait divers opère – et tous les faits divers, à des degrés plus ou moins importants, sont sublimes, forcément sublimes, comme disait Duras de l’un d’eux, avec presque une sorte de fatigue ou de lassitude, tant ce n’est pas du jeu, c’est gagné d’avance : le fait divers vient de loin, il nous raconte, il nous sublime dans notre vertigineuse capacité d’épouvante. Car ce qui intéresse le romancier, ce n’est pas strictement la situation, ou la manière dont il la met en scène dans le cadre de la fiction, s’appropriant des moyens ou des codes qui lui sont peu coutumiers, mais ce que sa méthode d’écriture peut gagner en s’y confrontant. C’est dans cet état que le dixième roman de Laurent Mauvignier laisse le lecteur, pantelant d’avoir vu de si près la « bête sauvage en plein milieu de la poitrine » que dissimulaient les personnages. Histoires de la nuit, de Laurent Mauvignier, est publié par Les éditions de minuit le 3 septembre 2020. L’interstice entre les deux, c’est ce que j’appelle le roman, l’espace d’un invisible, d’une présence que deux signes distincts et opposés rendent perceptibles. En réponse à une question prévisible (mais cependant utile) : “La fin, terrible, était-elle prévue dès le départ ?”, il répond : “Absolument pas, et elle est pour moi surprenante, parce que je me suis aperçu qu’elle est liée à des choses extrêmement personnelles comme la mort de mon père. Ils sont mariés, Ida est née, le bonheur est dans le pré pourrait-on croire, si ce n'étaient les problèmes d'un couple bancal, auxquels Bergogne fait front en allant quelquefois aux putes dans la ville voisine pour éponger sa frustration sexuelle. Se sentir en sécurité dans sa maison, selon qu’elle soit de paille, de bois ou de brique. ), il doit lui en rester quelque chose de très précieux, à savoir l’art et la manière de rendre visible, par le langage. Histoires de la nuit de Laurent Mauvignier renouvelle l’univers d’un écrivain majeur, tout en assumant une esthétique et une forme romanesque très fortes. Cette question est aussi à l’œuvre dans Histoires de la nuit, dans ce que j’ai essayé de nourrir chez le personnage un arrière-plan singulier, familial, personnel, pas tant pour lui donner une épaisseur que parce qu’il a le droit, comme tous les autres, qu’on la révèle à la personne qui lit le livre, et qu’il n’est pas qu’une « fonction narrative ». Au hameau de L'Écart-des-Trois-Filles-Seules à La Bassée [1], Patrice Bergogne est un éleveur de vaches qui a repris l'exploitation de son père. D’Histoires la nuit, Laurent Mauvignier dit : ce livre “prend acte de mon incapacité à produire de l’extérieur. Tu vas mourir aussi. Laisser un commentaire Annuler la réponse. Ma question sera double ici : en quoi tout d’abord l’image consiste tout d’abord pour vous à devoir se débattre dans le cliché, à chercher à en sortir ? J’apprends, en découvrant l’entretien mené par Johan Faerber pour Diacritik, que Mauvignier s’est donné quelques contraintes, dont la longueur, à peu près égale, des chapitres (une dizaine de pages en moyenne – dit-il ; il y en a 46, soit 23 x 2 – les derniers mots du chapitre 23 étant “on dirait qu’on t’attend” ; et les premiers du 24 : “Vous êtes qui ? Indéniable exploit romanesque à l’architecture admirable, puissance narrative d’exception, intrigue palpitante et sans cesse relancée, Histoires de la nuit est un époustouflant page turner qui ne cesse de s’interroger sur ce qu’est l’écriture et le récit aujourd’hui. Vous aimez ce livre ? Pourtant, dans Loin d’eux il y a cette jeune femme dont Luc est amoureux, et qui ressemble à Jean Seberg. Nom * Adresse de messagerie * Site web. A La Bassée, une petite communauté rurale à l'abandon, Bergogne et sa femme Marion vivent avec leur fille Ida. C’est son terreau, comme d’autres romanciers, dont Faulkner, ont le leur. Diriez-vous qu’il s’agit de personnages de tragédie ? Entre ceux, sans pitié, qui mènent la danse de cette dramatique prise d'otages et ceux, apeurés, tétanisés, qui cherchent par quels moyens sauver leur peau, s'insinue l'enfant, Ida, plongée dans la cruauté des adultes, exposée au feu des révélations dévastatrices. Laurent Mauvignier est parti dun scénario de 35 pages pour faire le récit dune séquestration de plus de … Au gré d’un subtil glissement, ils passent un temps sur le devant de la scène du roman. « Histoires de la nuit », de Laurent Mauvignier, Minuit, 640 p., 24 €, numérique 17 €. La littérature américaine, je l’ai découverte assez tardivement : Faulkner en premier, Dos Passos, Flannery’O’Connor, et puis tous les autres, bien sûr, tellement nombreux jusqu’à Carver, Lucia Berlin. Tous mes livres sont des huis clos, tous parlent de l’enfermement : Continuer retire les murs, Histoires de la nuit les remet. Histoires de la nuit, de Laurent Mauvignier, est publié par Les éditions de minuit le 3 septembre 2020. Vrai aussi pour Bègue, Denis, et, dans une moindre mesure, Christophe, trop comédien pour avoir une vraie profondeur. La quasi-totalité du roman se déroule dans un cadre épuré, tragique par son minimalisme, un décor isolé, au bord de l’effritement. Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique LeFigaro 24 septembre 2020 Laurent Mauvignier. Si on voulait raconter cette histoire à des enfants, on pourrait la raconter sous forme de conte, avec les trois frères comme les trois méchants loups. Minuit Roman Francais Minuit 3 Septembre 2020 Littérature générale; Voir les détails produits . huis-clos   ... Lire la suite Les protagonistes y passeront un temps qui s’écoulera lentement, un temps qui est aussi celui d’une écriture qui distille : un roman à suspense suit des règles que nous aimons respecter. Elle tombera la première, sous les coups d'un des trois hommes, dans cette longue traversée d'une nuit qui semble ne jamais devoir finir. Commentaire Signaler un abus. Agent : Isabelle de la Patelière - UBBA - 3, rue de Turbigo, 75001 PARIS - info@ubba.eu, Archives : On peut trouver à la disposition des chercheurs un fonds Mauvignier à la Bibliothèque Jacques Doucet des Universités de Paris. On s’active, on se prépare pour l’anniversaire de Marion, dont on va fêter les quarante ans. Dont le lecteur qui n’est pas le dernier à y mettre du sien… C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne faut rien lui souffler d’avance à l’oreille, pour le laisser libre de frayer dans cette généreuse matière, à sa guise et au bon tempo (qui est en premier lieu le sien, même si, comme on le sait, tout livre vraiment écrit impose ses propres tempi). Cette phrase, on en adopte très vite le rythme, on en accepte la sinuosité : lire Mauvignier, découvrir la beauté d’un tel roman est à ce prix. Apprendre à finir, mon deuxième roman, c’était ça : essayer de hisser l’histoire banale d’une femme de ménage que le mari veut quitter, à la hauteur d’une tragédie, et ce parce que, quelle que soit notre histoire, quand elle nous frappe intimement, elle ne se vit qu’avec la puissance d’un sentiment tragique, quand bien même nous ne serions que des passants inconnus, ceux que les médias, dans leur indifférence ou leur bêtise crasse, nomment des « anonymes ». Histoires de la nuit Laurent Mauvignier. Mais ce qui domine et fascine, c'est le travail littéraire, la mise en place d'une mécanique en forme de machine infernale, qui monte crescendo et ne cesse, page après page, de surprendre, d'étonner, de fasciner. Roman théâtral, en raison de ces divisions dans l’espace, Histoires de la nuit l’est aussi par l’importance du dialogue. *Histoires de la nuit. Au terme de cette épreuve, le sang coulera. Editions de minuit. Une violence qui contamine même l'enfance. Je note que, s’il est exact que j’ignore à peu près tout de la biographie de l’auteur d’Histoires de la nuit, j’ai quand même enregistré qu’il a fait des études d’arts plastiques, ce qui fait que, même s’il a dû probablement remiser les outils des pratiques auxquelles il s’est essayé (mais lesquelles ? Histoires de la nuit nous hante longtemps. C’est la première fois que j’opère comme ça, mais il faut dire que c’est la première fois que j’ai écrit un livre qui est une sorte d’adaptation d’un film qui n’a pas été tourné. Mais de quelle fiction parle-t-on, si ce n’est une métafiction qui doit coller à l’idée qu’on se fait de la fiction, une fiction de fiction pour que chacun, partout dans le monde, puisse avoir l’impression de reconnaître un film qu’il a déjà vu : on voit deux avions entrer dans des tours et l’on a tous l’impression de reconnaître un film, sauf que ce film n’a jamais existé, que personne ne l’a jamais filmé ni vu dans une salle de cinéma. Mais celle-ci doit être souple, il faut parfois revenir pour lui rendre de l’élasticité et donc supprimer beaucoup à l’intérieur de son système, car il faut préserver son irrigation pour donner d’abord à ressentir au lecteur sa respiration et sa nervosité. ...une idée aussi sotte peut-être que celle qui prête de la pureté aux enfants, comme si leur prétendue innocence n'était pas une invention d'adultes fatigués de leurs propres turpitudes. Quand il le tourne, Kazan a 63 ans, c’est un film écrit par son fils à partir d’un fait divers (deux GI reviennent se venger d’un des leurs qui les a dénoncés après le viol d’une jeune vietnamienne pendant la guerre). Et des surprises. 42,95 $ Feuilleter. C’est à partir de là que je me suis dit que si je reprenais les trente pages que j’avais pour en faire un roman, je pourrais par ce biais arriver à créer un espace différent, presqu’un anti-scénario, à force d’extension. En quoi s’agit-il pour vous par cette équivalence de traitement entre un désastre mondial et un désastre intime de proclamer une égalité démocratique du roman ? de Laurent Mauvignier. Le vécu imposerait de travailler d’une manière plus documentée, plus journalistique que je ne le fais. Main Histoire de la nuit. De fait, en quoi ces histoires de vampires et de sorcières déployées dans ces contes vous paraissent-elles faire écho au destin des personnages de votre récit ? Le texte contient une allusion à cette forme distendue : « Alors ce qui se passe va très vite, et c’est comme si seulement un très long ralenti pouvait le rendre visible. Ou qu’une même histoire devra être interprétée d’autant de manières qu’il y a de personnages dont on suit non seulement les faits et gestes, mais aussi la vie intérieure ? Plus la journée avance, plus l’ambiance s’alourdit, jusqu’à l’irruption de trois hommes qui les séquestrent pendant toute une nuit. C’est une entreprise considérable, nécessaire, peu courante, admirable. Un livre d’aujourd’hui… et de tous les temps. Ce ne sont pas des films très connus, mais ils appartiennent tous les deux au genre du home invasion movie. Patrice Bergogne, son mari très amoureux, rna1 payé en retour, organise 1a fête, pour elle et leur petite fille, Ida. Ida devient Ida au regard fixe, comme d’autres sont le rusé Ulysse, mais le regard fixe d’Ida renvoie à la photo de David Seymour et à son modèle Tereska, qui est à l’origine du désir de peinture de Christine, le point de départ de sa vocation. J’ai écrit ce scénario, et, en parlant avec Sylvie Pialat, qui avait produit le premier court, j’ai compris que c’était une histoire tellement vue au cinéma, tellement archétypale qu’elle n’était pas nécessaire. On retrouve en effet dans ce gros livre – jamais Mauvignier n’avait écrit un texte aussi long (et, comme Dans la foule ou Autour du monde, l’ampleur du récit en augmente singulièrement la valeur) – la patte d’un écrivain, les circonlocutions d’une écriture, sa manière d’encercler par le langage des situations ou des sentiments, sa précision. Dans une langue ample et puissante, Laurent Mauvignier met en scène un thriller singulier, fort en suspense et en humanité. Alors surgissent les trois frères maléfiques. Marion va fêter ses quarante ans, la fête est en pleine préparation. Parce que le suspense qui la fond procure un plaisir incontestable – et constitue une raison évidente à ce que les 630 pages du volume défilent sous nos yeux à vitesse grand V. On sent chez Laurent Mauvignier le goût du feuilleton qui tient le lecteur en haleine, chaque fin de chapitre suggérant une action à venir grave ou déterminante, tandis que le récit se déroule alternativement dans l’une ou l’autre maison, ce qui multiplie par deux l’attente de ce qui va suivre. Auteur. Editions de minuit. Il y a bien longtemps que le nom de Laurent Mauvignier chatouille mon oreille et attise ma curiosité, auteur à la plume si souvent vantée de textes courts et époustouflants. Elle sera bien utile. « L’écart des trois filles seules » est un nom fictif. Non, je ne le dirai pas. Avec "Histoires de la nuit", Laurent Mauvignier signe un admirable roman, un suspense littéraire et psychologique. Ce qu’on pourrait dire aussi du cinéma : la mondialisation fait que l’hégémonie américaine n’est plus que commerciale avec les grosses machines, mais pour ce qui est de l’art, on peut trouver partout dans le monde de quoi s’étonner, s’émouvoir, réfléchir, et surtout renouveler l’idée qu’on se fait de la littérature. Edité par Minuit - 2020 . N’est-ce pas le souhait de Bergogne quand il veut plaire à sa femme ? Le 4321 de Paul Auster m’a aussi énormément plu dans son rapport à l’histoire et à la construction romanesque, et, ce qui est plus rare dans un roman américain, dans son écriture. C'est Denis enfin, l'aîné, animé d'une haine poisseuse parce que la femme qu'il croyait posséder l'a quitté. L’idée c’était de faire exister chaque séquence comme si elle était sa propre finalité, c’était à chaque chapitre un nouvel engagement, il fallait pousser une porte qui soit à la fois différente et liée à la continuité romanesque. Histoires de la nuit de Laurent Mauvignier renouvelle l’univers d’un écrivain majeur, tout en assumant une esthétique et une forme romanesque très fortes. Le chef des sept bandits est un personnage complexe qui est blessé. Histoires de la nuit, de Laurent Mauvignier, est l’un des romans de la rentrée littéraire. Mauvignier : Histoires de la nuit. C’est que le roman, par la dilatation du récit qu’il met en œuvre, par les rebours que son ampleur permet, par la simplicité de sa trame narrative – il faut dire qu’on est surpris à plusieurs reprises dans la progression du récit alors qu’on se dit que tout y est d’une logique implacable, comme on sursaute dans un film d’épouvante –, aiguise des moyens littéraires et permet d’instaurer et de mettre au jour une méthode d’écriture en même temps qu’un certain rapport à la fiction. – bien davantage que de coutume soit neutralisée (en attendant la prochaine ?) Le cinéma américain, d’abord, avec son cinémascope et ses paysages, a tout emporté, et même les grimaces de De Funès ou les cascades de Belmondo ne faisaient pas tout à fait le poids, bien qu’on les aimait comme des membres de notre famille – ou peut-être même à cause de ça. HISTOIRES DE LA NUIT MAUVIGNIER LAURENT Editeur : MINUIT Collection : ROMANS Date de parution : 03/09/2020 [ean : 9782707346315] En stock ! littérature française   Ce soir, les masques tomberont avec la nuit et les histoires qui s’y raconteront déferont tous les beaux rêves. Ce rôle protecteur, la nuit, c’est Patrice qui l’a. De laurent mauvignier . En quoi était-il primordial pour vous d’écrire en ménageant le suspense et notamment en jouant sur la vitesse du récit, ses brusques accélération et ses nombreux rebondissements ? Bien entendu, il est interdit de raconter, même de manière rudimentaire, ce qui se trame dans cette histoire, le mieux étant finalement de ne rien dévoiler, les sept lignes imprimées en 4e de couverture devant suffire à nous mettre l’eau à la bouche : “Il ne reste presque plus rien à La Bassée : un bourg et quelques hameaux, dont celui qu’occupent Bergogne, sa femme Marion et leur fille Ida, ainsi qu’une voisine, Christine, une artiste installée ici depuis des années. Elle est la meneuse. bljd.sorbonne.fr. Pas sûr. Contact : Pour contacter directement Laurent Mauvignier, on peut envoyer un courriel aux Éditions de Minuit, à : presse@leseditionsdeminuit.fr qui feront suivre. Download books for free. D’où l’importance des lieux, des objets, rendus avec précision, avec un grand sens du détail, comme procédant de dessins tracés au scalpel (les armes blanches, les lames, ont un grand rôle dans cette histoire).